Dimanche 1er janvier 2023 – Journée mondiale de la paix

Introduction

Chers frères et sœurs !

Aujourd’hui, nous tournons les yeux vers celle qui présente l’enfant Jésus, huit jours après sa naissance, pour la circoncision et pour le don du nom : Jésus (Yeshoua – Dieu sauve) – Emmanuel (Immânû ’El – Dieu avec nous) ; le prophète Isaïe ajoute : Merveilleux Conseiller, Dieu Fort, Père à jamais, Prince de la Paix.

Si la paix est une aspiration fondamentale de chaque personne de bonne volonté, la paix est un mandat permanent qui engage chacun des disciples du Christ ; c’est pourquoi nous avons reçu la mission exigeante d’annoncer et de témoigner de « l’Évangile de la Paix ».

A Pellevoisin, il semble que la Mère de Miséricorde veuille transmettre ce qu’elle a gardé et médité dans son cœur, depuis l’annonce de l’ange puis à travers toutes les étapes de sa vie avec Jésus-Emmanuel. Elle nous invite à parcourir le chemin de la paix, balisé par les mystères du rosaire. Jour après jour ce chemin configure notre vie au Prince de la Paix et fait de nous d’infatigables artisans de paix.

Marie Reine de la paix et mère de miséricorde ouvrez nos yeux sur les moments où nous avons failli sur ce chemin du salut, particulièrement lorsque nous avons manqué de calme intérieur et extérieur.

Implorons la miséricorde de Dieu pour nous-mêmes, nos proches et le monde entier.


Homélie

Chers frères et sœurs !

Dans la première lecture nous avons écouté l’antique bénédiction sacerdotale sur le peuple de l’alliance. Il est particulièrement significatif qu’au début de chaque nouvelle année, Dieu projette sur son peuple, sur nous, la lumière de son saint Nom, par la formule solennelle de cette bénédiction, à laquelle nous avons répondu, avec les paroles du Psaume 66, « Que Dieu nous bénisse, qu’il fasse resplendir sur nous son visage ».

Chaque premier janvier, depuis 1968, date de l’instauration de la Journée Mondiale de la Paix le jour même de la fête de Marie Mère de Dieu, les successeurs de Pierre ne cessent de rappeler les « foyers de tension et d’opposition causés par des inégalités croissantes entre riches et pauvres, par la prévalence d’une mentalité égoïste et individualiste qui s’exprime également au travers d’un capitalisme financier sans régulation ». Et dans le même temps ils mettent en exergue, selon les mots du feu pape Benoit XVI, « les nombreuses œuvres de paix dont le monde est riche, qui témoignent de la vocation innée de l’humanité à la paix. Toute personne humaine est faite pour la paix, qui est à la fois un don de Dieu et un engagement à mettre en œuvre. « Heureux les artisans de paix, parce qu’ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5,9). Cette béatitude dit que la paix est à la fois don messianique et œuvre humaine… Un bonheur reçu et un bonheur à conquérir. C’est la paix intérieure avec soi-même et la paix extérieure avec le prochain et avec toute la création.

Regardons donc d’abord la paix comme don de Dieu, puis comme à construire avec effort. La Vierge Marie à Pellevoisin a parlé de cette paix sous le terme de calme, calme dans le cœur d’Estelle, calme dans l’Église et calme dans la société.

1/ La paix est un don de Dieu, d’abord intérieur qui ensuite rayonne à l’extérieur.

Avec un peu de lucidité il est facile de déceler l’agitation à l’intérieur et autour de nous. Quel est donc le fondement et l’origine de cette paix à laquelle tous aspirent ? Comment pouvons-nous trouver la paix, malgré les problèmes, les obscurités, les angoisses ? Les lectures de la liturgie d’aujourd’hui nous éclairent. Particulièrement l’Évangile de Luc nous émerveille devant la paix intérieure de Marie, la Mère de Jésus. Regardez : durant les jours où « elle mit au monde son fils premier-né » (Lc 2,7), tant d’événements imprévus se sont produits : l’annonce du recensement ordonné par le pouvoir colonial, le voyage fatigant de Nazareth à Bethléem, le fait de ne pas trouver de place à l’auberge, la recherche d’un refuge de fortune dans la nuit ; et puis le chant des anges, la visite inattendue des bergers et des mages.

En tout cela, Marie ne s’agite pas, elle ne se laisse pas bouleverser par des faits qui la dépassent ; elle considère simplement, en silence, ce qui arrive, le garde dans sa mémoire et dans son cœur. Elle réfléchit avec calme et sérénité, éclairée par la foi. Telle est la paix intérieure que nous voudrions avoir au milieu des événements parfois tumultueux et confus de l’histoire, événements dont souvent nous ne saisissons pas le sens et qui nous déconcertent, voire nous angoissent.

La première Lecture nous rappelle que la paix est don de Dieu associé à la splendeur du visage de Dieu. Le Livre des Nombres transmet la bénédiction utilisée par les prêtres de la Première Alliance. La Vierge Marie n’a-elle pas reçu cette bénédiction plus que tout autre ? Bénédiction qui par trois fois invoque le saint nom de Dieu en le reliant à deux actions en faveur de l’homme :

« Que le Seigneur te bénisse et te garde.

Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il se penche vers toi.

Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix » (6, 24-26).

La paix est donc le fruit du rayonnement de la splendeur de son visage. Mais comment concrètement en cette vie contempler le visage du Seigneur?

L’apôtre Paul l’exprime dans la Lettre aux Galates (4, 4-7), en parlant de l’Esprit qui clame du plus profond de nos cœurs : « Abba ! Père ! » Le visage humain visible de l’Enfant Jésus, Fils de Dieu fait chair, nous a fait percevoir le visage invisible du Père Éternel. Par le don de l’Esprit Saint, Jésus nous a fait connaître qu’en Lui nous sommes nous enfants de Dieu. Saint Paul insiste : « Et voici la preuve que vous êtes des fils : envoyé de Dieu, l’Esprit de son Fils est dans nos cœurs, et il crie vers le Père en l’appelant « Abba ! Père ! » » (Ga 4, 6).

Chers frères et sœurs, nous est offert de contempler dans le Christ-Jésus la splendeur du visage de Dieu Père, qui est la source de notre paix. Le Seigneur tourne vers nous son visage : sous le visage de l’Enfant Nouveau-né se montre Père, qui nous donne la paix.

La source de cette paix profonde est donnée dans la foi. Rien ne peut ôter aux croyants cette paix, pas même les difficultés et les souffrances de la vie. Et l’espérance ne déçoit pas parce que « l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5, 5).

La Vierge Marie, Mère de Dieu, nous conduit vers le visage de Jésus, Prince de la Paix. Elle nous soutient et nous accompagne en cette nouvelle année ; puisse-t-elle obtenir pour le monde entier le don de la paix.

2/ Après avoir insisté sur la paix comme don de Dieu, regardons-la comme un engagement à mettre en œuvre.

Oui, même si les événements de notre existence semblent tragiques et que nous nous sentons comme poussés dans le tunnel sombre et pénible de l’injustice et de la souffrance, nous sommes appelés à garder le cœur ouvert à l’espérance. Renouvelons notre confiance en Dieu sans cesse présent à nos côtés. Il nous accompagne avec tendresse, nous soutient dans notre fatigue et guide notre chemin.

Saint Paul nous exhorte à une attitude de coopération avec Dieu : « tu n’es plus esclave mais fils ». Il s’agit de rester en éveil, à ne pas nous enfermer dans la peur, la souffrance ou la résignation. Ne pas cédons à la distraction (au sens de Pascal), ne nous laissons pas décourager, mais au contraire soyons comme des sentinelles capables de saisir les premières lueurs de l’aube, surtout aux heures les plus sombres.

Après l’épidémie de covid et la prise de conscience des désordres dans l’Église, d’une part la guerre terrorise à nouveau en plusieurs endroits du monde, d’autre part les idéologies occidentales qui, sous couvert du respect de la liberté des personnes déstructurent profondément la société, mais aussi la globalisation incontrôlable de l’économie asservit dangereusement le bien social et politique. Les nombreuses crises morales, sociales, politiques et économiques que nous vivons sont toutes interconnectées.

Le pape François dans son message pour la paix insiste sur le fait que : « d’un moment de crise : on en sort soit meilleur, soit pire ». Notre libre choix est engagé. A l’exemple de saint François d’Assise, tâchons, dans une écologie intégrale, d’établir des « cercles vertueux » entre la pauvreté « à choisir » et la pauvreté « à combattre » (la misère).

Nous serons les sentinelles de l’Aurore si nous faisons grandir la conscience du fait que nous avons tous besoin les uns des autres. Notre plus grand trésor, et aussi le plus fragile, est la fraternité humaine fondée sur notre filiation divine commune, et que personne ne peut se sauver tout seul. Seule la paix qui naît de l’amour fraternel et désintéressé peut nous aider à surmonter les crises personnelles, sociales et mondiales.

L’humanité ne peut pas se résigner face à la force négative de l’égoïsme et de la violence; elle ne doit pas s’habituer à des conflits provoquant des victimes et mettant en danger l’avenir des peuples. Céder au découragement ou à la résignation c’est faire l’œuvre du démon, l’adversaire du genre humain. La paix est le fruit de la victoire d’un combat spirituel qui nécessite des armes spirituelles : la lumière et la miséricorde.

Hommes et femmes de bonne volonté, soyons, jour après jour, des artisans de la paix !

Que Marie, Mère de Jésus toute miséricordieuse et Reine de la Paix, intercède pour nous et pour le monde entier.

Frère Laurent, recteur du sanctuaire.